Sunday, December 9, 2007

L’âme de la cuisine


Maman nous a toujours fait deux sortes de soupes de nouilles. Le Mì qui est un bouillon chinois à base de porc servi avec des nouilles jaunes à l’œuf et le Phở qui est la soupe traditionnelle vietnamienne à base de bœuf et servie avec des nouilles de riz de couleur blanche. J’ai des souvenirs différents de l’un et de l’autre. Dans les deux cas c’était un bouillon que Maman aurait fait plutôt un samedi et que nous aurions mangé le dimanche (le bouillon est toujours meilleur le lendemain). Comme toutes les soupes de nouilles ce sont des plats qui sont servis individuellement et apportés à table tout faits et déjà « dressés », Maman aurait toujours préparé les premiers bols puis nous aurait laissé servir le deuxième bol, et c’est quelque chose que j’adore faire : l’assemblage de la soupe avec tous ses petit ingrédients. Rien que d’en parler ça me donne faim.
Dans le cas du Mì :
- découper des tranches de porc bouilli
- mettre des nouilles (jaunes à l’œuf) au fond d’un bol
- placer les tranches de porc sur les nouilles
- verser une louche de bouillon pour bien couvrir
- placer sur le dessus une petite cuillère de choux salé chinois
- verser un filet d’huile de sésame
- garnir de coriandre
- finir avec un bon tour de poivre (Maman poivre toujours beaucoup)

Une version de cette soupe est servie sans porc mais avec du canard laqué, et c’est aussi une soupe traditionnelle dans la famille, que nous ne mangeons qu’au restaurant, car le canard laqué est vraiment un truc de restaurant : je n’ai jamais vu personne le faire à la maison.

Je pense qu’il y a quelque chose de très fort dans la fabrication d’un bouillon, c’est en somme un procédé de base qui n’a pas les lettres de noblesses qu’ont la distillation ou la fermentation. J’ai toujours vu en grandissant une grande casserole remplie d’os qui mijotait dans la cuisine et j’ai toujours vu Maman écumer, écumer et écumer. Lou me disait chez Relish que ses bouillons ont pour lui ce côté un peu spécial et sacré. D’abord, c’est une responsabilité collective, c’est le devoir de chacun des cuisiniers de s’arrêter devant et d’écumer le dessus du bouillon, à n’importe quelle heure de la journée. Mais surtout, dans toute l’agitation d’un restaurant, à l’heure tous les cuisiniers courent à droite et à gauche pour exécuter les commandes, la grande casserole trône toujours au milieu de la cuisine, mijotant calmement et faisait doucement son travail, sans hâte ni agitation, si ce n’est celle des quelques petites bulles qui surgissent à la surface. Ce bouillon, qu’il soit de veau ou de poulet, une fois réduit, deviendra le « demi-glace » servira de base à toutes les sauces. Pour Lou, c’était un peu « l’âme » de sa cuisine et je trouve que c’est une belle manière d’en parler.

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On reconnaît un bon bouillon à sa transparence, que l’on obtient QUE si on l’a fait mijoter sans le faire bouillir


Bouillon chinois
A utiliser pour Chao (Bouillie de riz – Congee) ou pour le Mì
300 g de carottes grossement coupées
150 g de navets
1 kg os de porc (Fresh pork Back Bones)
400 g d’os de poulet

Mettre les os dans une grande casserole. Couvrir d’eau froide. Porter a ébullition.
Une fois l’ébullition obtenue, jeter l’eau, rincer les os deux fois. Cette opération sert à débarrasser les os de leurs impuretés
Remettre les os dans la casserole, puis ajouter les carottes. Couvrir d’eau et ajouter encore en plus un quart du volume, et une cuillère à soupe de gros sel.
Porter à ébullition. Quand l’ébullition est bien forte, écumer, baisser le feu au minimum et couvrir partiellement. Ajouter encore 1 cuillère à soupe de gros sel.
Cuire 3 heures sans bouillir pour ne pas troubler le bouillon. Ajouter de l’eau au fur et à mesure pour que l’eau couvre toujours les os.
Ceci est le bouillon de base pour le Cháo qui est le « congee » ou la bouillie de riz

Variante pour le bouillon de Mì:
Une sèche ou calamar (séché), une moitié suffit
500 g d’épaule de porc sans os
Nouilles chinoises (Mì)
huile de sésame
coriandre
Choux salé

Ajouter une moitié de sèche ou calamar (séché), et un quart de navet. Faire bouillir, écumer puis baisser le feu au minimum et faire mijoter 2 heures.

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Maman aime tellement les sèches de Chinatown qu’elle me demande d’en rapporter dans ma valise quand je rentre en France, ça vous rappelle quelque chose les « balikbayan » ?

Ajouter la viande de porc (épaule de porc sans os) en gros morceaux. Faire bouillir puis baisser le feu au minimum pendant 15 minutes. Ecumer bien entendu.
Retirer la viande et se débarrasser des os en filtrant le bouillon. Faire l’assaisonnement final : Sel, Nuoc Mam et une pincée de Glutamate.

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Le porc avant qu'il ne soit cuit

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Le Porc une fois cuit et découpé

Faire les nouilles : faire bouillir de l’eau et mettre les nouilles dans la casserole. Quand c’est cuit, retirer les nouilles en laissant l’eau de cuisson pour faire une nouvelle fournée.

Enfin, c’est l’assemblage (voir plus haut), c’est le plus marrant avant de déguster !

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L'assemblage, j'adore


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Le Mì, un moment de bonheur en famille

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