Sunday, November 23, 2008

« Y’a plus d’saison ma p’tite dame »



Cette semaine je suis retourné chez R. pour dîner. L. m’a dit qu’il ne serait plus chez eux très longtemps et qu’il chercherait un autre restaurant en janvier, bon c’est à prendre avec des pincettes car L. est du genre à toujours se plaindre et dire qu’il va changer de boulot, mais ça avait l’air sérieux cette fois-ci. Et j’ai appris aussi que chef Lee va changer de restaurant en janvier alors qu’il vient juste de décrocher deux étoiles Michelin.
Ça m’a mis dans une drôle d’humeur.
Je me suis dit que les choses telles que je les connais, un jour ou l’autre, sont toujours amenées à changer, et que j’ai tendance à m’attacher aux choses comme elles sont; je me suis mis à me demander si je pourrai revenir travailler chez eux comme je l’ai fait, si les brigades seront les mêmes ou non, si ces endroits que j’aime tant seront toujours aussi accueillants lorsque je ne connaîtrai plus personne.
Et bien sûr une humeur comme ça, ça me donne terriblement envie de cuisiner. Ça me donne envie de faire quelque chose de mes mains, de fabriquer quelque chose de bon, de me convaincre que certaines choses, quoi que je fasse, et où que je sois, auront toujours le même goût.
Donc je me suis mis en tête de refaire des boudins noirs, et je me suis remis en quête de sang de porc.
Ça aurait du être facile vu que la dernière fois j’en ai acheté à Chinatown à Philadelphie, donc je devrais en trouver à New York, non ? Et bien, non. J’ai couru dans tout Chinatown, je suis allé dans les grands supermarchés chinois, les petite boucheries, les grandes boucheries : à New York, les chinois ne vendent que du sang CUIT. Alors c’est pas comme ça que mon humeur s’améliorer. Après avoir hésité et réfléchi, je me suis donc résolu à changer d’idée. Je ne vais pas faire du boudin noir, mais du boudin blanc. Bon il faut savoir qu’en grandissant, je n’ai jamais été un grand fan de boudin blanc, c’est quand même moins intéressant que le boudin au sang de porc. Et je ne sais pas, j’ai toujours trouvé ça un peu plus fade. Mais bon, dans cette situation d’urgence, ça peut être un projet intéressant, ça peut me permettre d’exercer ma technique de saucisse, ça me permettra aussi d’étrenner mon nouveau hachoir à viande (l’attachement du Kitchenaid que j’ai trouvé à 49 dollars!), donc je me suis décidé, et c’était bien marrant. Complètement à refaire. Je pense que la consistance de mon mélange n’était pas parfaite, je ne suis pas sûr si la saucisse doit être si aérée, la prochaine fois j’essaierai d’avoir un mélange plus compact, en mettant moins de lait et d’œufs peut-être. En tout cas, le goût était authentique, ça m’a vraiment rappelé des choses. La dernière fois que j’ai mangé ça, c’était en France, il y a au moins 10 ou 15 ans.

Encore la recette de Monsieur Ruhlman bien sûr.


BOUDIN BLANC

  • 1 livre / 450 g. d’épaule de porc sans os (pâtes arrière, ça s’appelle le jambon, c’est ça ?), coupé en cubes de 2,5 cm
  • 1 livre /450 g. d’escalope de poulet sans os ni peau coupé en cubes de 2,5 cm
  • 1 ½ tbsp / 20 g. de sel (au goût, j’en ai mis plus, environ 3 ou 4 g. de plus)
  • 1 tsp / 3 g. de poivre blanc moulu
  • 1 ½ tsp / 6 g. de mélange Quatre-Epices (3 mesures de poivre, 1 mesure de noix de muscade, 2 mesures de cannelle, 2 mesures de clous de girofle, le tout bien moulu)
  • 8 gros œufs
  • 2 ½ cups / 600ml de lait entier (j’en ai mis moins, je dirai, 550ml)
  • 3 tbsp / 30 g. de farine
  • 2,5 m. de boyaux de porc (trempés dans de l’eau au moins 30 min. et rinsés)


  1. Hacher la viande (porc et poulet) dans un bol disposé dans un bain à glace pour garder le tout froid. (j’ai mis aussi tous mes instruments, hachoir etc au congélateur avant de commencer, et oui, vous la voulez cette émulsion ou non ?)
  2. Mélanger la viande, le sel, poivre et le mélange Quatre-Epices dans le Kichenaid et mélanger pendant 30 sec. Continuer à mélanger et ajouter les œufs un à un , puis le lait et la farine. Je mettrai le lait en dernier car ça a tendance à rendre le mélange très liquide. Mélanger et mettre au frigo si nécessaire pour garder la température du mélange en-dessous de 16 degrés C. L’émulsion doit se faire, c’est-à-dire que le mélange doit devenir un peu onctueux et un peu uniforme.
  3. Prendre une cuillère du mélange et le cuire pour goûter et ajuster l’assaisonnement.
  4. Remplir les boyaux avec le mélange (le garder toujours aussi froid que possible). Alors là ce que j’ai appris c’est que l’on peut se permettre de faire des saucisses pas très tassées et quand on les tourne pour former les divisions entre les saucisses, elles se tassent naturellement.
  5. Pocher les boudins à 170 degrés F. (76 degrés C.) jusqu’à ce que la température interne des boudins soit de 160 degrés F (71 degrés C.). Ça prend bien 20 minutes. Refroidir les boudins dans un bain d’eau glacée.
  6. Pour servir, faire cuire les boudins au beurre à feu moyen, pour qu’ils prennent une belle couleur de grillé


ca fait des bruits

hacher c'est amusant




saucisse

on remplit les boyaux, ça a l'air de saucisse, tout va bien




les boudins deviennent blanc a la cuisson

les boudins passent du rose au blanc au pochage




boudins blancs

le résultat avant cuisson: pas mal, ça ressemble bien à ce qu'on trouve chez le charcutier
!

Saturday, November 22, 2008

Kouign Amman


kouign amman, originally uploaded by Frenchnamese.


H.-M. et C. sont venus me voir de France juste avant leur congrès à New York et ils m’ont apporté quelque chose de Bretagne : du KOUIGN AMMAN ! Ça c’est de la pâtisserie bien rustique : c’est que du beurre et du sucre. Réchauffé au four c’est vraiment excellent. En gros c’est une sorte de mille-feuille avec beaucoup plus de beurre et sans crème pâtissière, c’est feuilleté et c’est caramélisé comme une tarte tatin. J’ai touvé une recette dans mon « meilleur et plus simple de la France », mais je crois que j’essaierai un autre jour (j’ai un autre projet ce week end).
Ça doit être la saison ou quoi, mais j’ai aussi reçu un paquet cette semaine avec de la bonne verveine de France que Coline m’a envoyée. Décidément, tout le monde me donne des petites gâteries de France. Je ne sais pas pourquoi mais je ne trouve pas de bonne verveine ici , à moins d’en acheter en plante au marché de Union square. Enfin, ça me donne de quoi tenir tout l’hiver à me faire des petites infusions, ou pour me faire pleins d' "entremets" (lisez bien l'étiquette). Yeah !


Verveine

"Une tisane, et au lit"



Friday, November 14, 2008

Bloody Sunday


boudins maison, originally uploaded by Frenchnamese.
Donc, voilà, nous y sommes, le véritable atelier de charcuterie a commencé : j’avais envie de boudin, le sang de porc ça se trouve à Chinatown, facile, et le reste, les boyaux tout ça, chez les bouchers italiens de Philadelphie.

Voici la recette, directement prise de Monsieur Ruhlman. Je l’ai divisée en deux pour ne pas faire 2 kilos et demi de saucisse!


Boudins et Calins

  • 450 g. de gras de porc (1 lbs)
  • 450 g. d’oignons pelés et émincés (1 lbs)
  • 125 g. de beurre (2 oz.)
  • 1 pomme et demie, Granny Smith, pelée, équeutée et émincée
  • 30 ml de cognac ou calvados (3 oz.)
  • 125 ml de crème liquide (1/2 cup)
  • 1 gros oeuf
  • 1 demi litre de sang de porc
  • 22.5 g. de sel
  • 3 g. de poivre blanc
  • 2 g. de mélange 4 épices
  • 3 g. de chèvrefeuille
  • 3 g. de ciboulette
  • 1 m. de boyaux de porc, trempés dans de l’eau tiède pendant au moins 30 min., rincés, noués au bout.


  1. Faire bouillir de l’eau. Ajouter le gras de porc, réduire le feu et faire mijoter à feu doux 20 minutes. Egoutter et mettre de côté. Si vous utilisez du lard, faîtes juste fondre à feu doux.
  2. Faire revenir les oignons dans 25 g. de beurre à feu moyen jusqu’à ce qu’ils soient mous et transparents, mettre de côté, ajouter le gras fondu.
  3. Faire revenir les pommes dans 25 g. de beurre à feu moyen jusqu’à ce qu’elles soient molles. Mettre le feu au maximum et ajouter le cognac ou calvados, cuire jusqu’à ce que l’alcool soit évaporé. Mettre de côté
  4. Mélanger les oignons et les pommes et mettre au frais (ne pas solidifier comme j’ai fait)
  5. Mélanger la crème et l’œuf dans un grand récipient, y ajouter le sang en faisant passer à travers un chinois (s’il est solide, mixez le avant pour le liquéfier). Ajouter l’assaisonnement et les herbes. Ajouter le mélange pomme/oignon/gras.
  6. Mélangez pour provoquer l’émulsion. Faire cuire à la poële une cuiller de ce mélange pour vérifier l’assaisonnement. Ajuster si nécessaire.
  7. Mettre toute la longueur d’un boyau sur l’extrémité d’un entonnoir, mettre une louche de mélange dans l’entonnoir, et débrouillez vous pour remplir le boyau sans mettre d’air et sans mettre de sang partout (et c’est là qu’il faut que j’ajoute de faire des portions en faisant des nœuds etc).
  8. Faire cuire les boudins formés dans de l’eau à 76 degrés C (170 degrés F) pendant 20 à 30 minutes. Faire refroidir puis mettre au frigo (ça va solidifier la saucisse).
  9. Pour les servir, faire cuire au four 15 minutes à 175 degrés C (350 degrés F) ou à la poële.


Alors, comment ça s’est passé ? Bien, pas parfaitement bien, mais bien quand même. Le résultat ressemble à ce à quoi ça doit ressembler, mais surtout j’ai compris ce qui s’est passé et je sais que la prochaine fois je peux faire dix fois mieux.
Déjà, comme j’étais complètement paranoïaque et que je voulais vraiment avoir une émulsion réussie, j’ai fait en sorte que mon gras de porc soit froid, le problème c’est qu’il était trop froid, et qu’il était même solide, et dans mon enthousiasme, je n’ai pas attendu qu’il fonde, donc j’ai eu en gros un mélange sang – gras qui ne se mélangeait pas parce que mon gras était solide. Heureusement, le gras, ça fond, et j’ai réussi au bout d’un moment à provoquer l’émulsion : le mélange a pris la consistance d’une vinaigrette ou plutôt d’une mayonnaise. Après cela, alors que je voulais que mon gras trop froid fonde, j’ai mal contrôlé ce réchauffement et la température du mélange a augmenté un peu trop, c’est pourquoi la fin de mon boudin est moins émulsifiée que mon début et qu’elle a pris des taches noires à la cuisson (le sang non-émulsifié).
D’autre part, je ne savais pas trop comment faire des portions de boudins, en gros ce que j’ai fait c’est que j’ai fait une grosse « couronne », une saucisse continue sans division, après, je l’ai pliée pour créer les divisions, mais ce n’était pas idéal, donc ce que je vais faire la prochaine fois, c’est faire un véritable nœud à chaque fois que je veux une division, et ce sera plus facile à diviser en portion.
Et enfin, mes boudins après cuisson étaient tout gonflés, et il faut que je vérifie s’il faut que je les perce un peu, ou s’il faut que j’attende qu’ils refroidissent avant que je les perce. Enfin bon on verra.
Fondamentalement, ce que j’ai appris c’est que le contrôle de la température est crucial en charcuterie et notamment pour faire des saucisses à émulsion.
En tout cas, le goût était très bien, ça m’a bien rappelé la mère Patrie (« abreuve nos sillons… »), et j'ai vraiment envie de recommencer et de parfaire la recette.


les boyaux sont vraiment hermetiques

En rincant les boyaux, on decouvre que c'est un materiau completement fascinant, solide, hermetique, mais souple a la fois


la consistence n'est pas bonne encore

mon gras est solide, je suis a deux doigts de rater mon boudin


la couronne se forme

j'avais jamais fait ca de ma vie. Faire des saucisses, c'est bien marrant


cru c'est tres sanglant

la "courrone" de boudin crue est assez sanglante


pochage a 170 degres F

Quand on le cuit, le boudin devient marron. Quand on les cuit pour les servir, ils deviendront noirs.

Boyaux


Il y a des repas qu’on n’oublie pas, il y a des plats qui marquent et dont on se souvient. Les pork buns, la poitrine braisée avec des petites allumettes de pomme en font partie. Cette fois c’est une fois de plus à Momofuku que ça s’est passé. Pour un jour, le chef Fergus Henderson est le chef invité chez Momofuku Noodle bar et j’ai réussi à être dans la queue à temps pour m’assoir aux meilleures places avec quelques amis. Bien sûr on s’attend à un festival de tripes et de parties bizarres, et on n’est pas mal servi si l’on considère cette perspective, mais pas incroyablement bien tout de même. On sent bien que David Chang est quand même plus à l’aise avec une autre sorte de cuisine. Donc pas une expérience hallucinante, mais durant le dîner, j’ai quand même eu une révélation. Les « chitterlings » qui sont en fait des intestins de porc et qui étaient grillés tout simplement, m’ont absolument transporté : le goût des tripes m’a rappelé tout de suite les andouillettes de Monsieur Carloux, le petit bout grillé avait la même saveur que lorsque Papa les cuit au charbon de bois dans le jardin, la texture me donnait l’impression de manger une bonne andouillette AAAAA à Noyon, je pouvais sentir dans ma bouche la petite laitue et la vinaigrette aux échalotes de Papa, cette même salade qu’on fait en général en semaine ou le weekend quand on est pressé. J’ai eu pendant quelques secondes l’impression d’être à Noyon, un dimanche en milieu de journée, j’ai eu pendant quelques secondes le sentiment de retrouver l’excitation d’un repas de weekend en famille.
Tout ça m’a terriblement donné envie d’andouillette.
Je me suis donc mis en tête que, de la même manière que j’ai commencé à faire des rillettes, je devrais aussi commencer à faire d’autres choses que je ne trouve pas ici. Sur les conseils de D. je me suis donc procuré l’excellentissime livre « Charcuterie » de Michael Ruhlman. Comme j’avais déjà lu certains de ses livres je me suis dit que c’était plutôt une source digne de confiance. Après un rapide coup d’œil à la librairie, je l’ai acheté, et j’avoue que c’est une livre complètement fascinant. J’ai appris des tonnes de choses, j’ai enfin compris pourquoi techniquement, j’ai raté mon pâté l’autre jour, c’était parce que fondamentalement, un pâté de cette sorte est une émulsion entre la viande et le gras et cette émulsion ne peut se faire que si la viande, le gras et les instruments et récipients qu’on utilise (notamment le hachoir) sont froids (plus froid que 16 degres Celsius) . Si la température du mélange est trop élevée, le gras et la viande vont se « séparer », et c’est exactement ce qui s’est passé avec mon pâté. Je croyais que c’était de l’eau qui était entrée dans mes bocaux pendant la cuisson, pas du tout, en fait c’est le gras qui a fondu et qui s’est retrouvé à la surface parce que mon émulsion n’avait pas marché : en effet mon hachoir et ma viande étaient à température ambiante.
Bref, je commence à m’intéresser à la charcuterie car c’est vraiment technique et c’est vraiment marrant, et c’est tellement bon !

Poulet au curry "de Maman"



Le poulet au curry de Maman, transcrit par Thanh-Loan et réalisé à la lettre.


POULET AU CURRY DE MAMAN

1 Poulet de 2 kg coupe en morceaux (ex : 1 os de cuisse coupe en 2 ou 3) – enlever le croupion. Séparer en deux fournées.
2 branches de citronnelle écrasées
1 oignon coupe en gros dés
2 cuillers à café de curry en poudre
2 cuillers à soupe de curry vinday (pate de curry)
2 cuillers à soupe d’huile
400 ml de lait de coco (1 boite de conserve ou 13.5 oz.)

Saler et poivrer les morceaux de la première fournée, ajouter une cuiller a café de curry, une cuiller a soupe d’huile. Mettre sur le feu moyen supérieur. Faire dorer.
Enlever du feu et mettre la deuxième fournée. Ajouter sel, poivre, curry et huile. Faire dorer la deuxième fournée de la même manière.
Retirer la viande et la garder de coté.
Faire revenir l’oignon (brun mais pas grillé) avec la citronnelle.

Baisser le feu et ajouter la viande. Ajouter assez d’eau bouillante pour couvrir la viande.
Mettre à feu fort brièvement pour écumer.
Puis mettre à feux moyen pour que ça mijote pendant 30 minutes.

Dégraisser. Rectifier l’assaisonnement avec sel. Ajouter le Curry Vinday (dilué dans un peu de sauce) et le lait de coco.

Refaire mijoter pour que la viande soit tendre. Réajuster l’assaisonnement avec du sel et de l’eau (pour avoir assez de bouillon).

Servir dans des bols avec de la salade et du Bun.

Chapterhouse


Je ne sais pas si c’est l’hiver, la saison, ou mon humeur personnelle, mais aujourd’hui, comme dimanche dernier, est un dimanche très « goûtu », « tasty », tout chaud et moelleux comme une brioche fraîche.
Philly, comparé à New York, a toujours un air de ville de province, plus petite et moins précieuse. Je suis allé au marché ce matin, parce que j’aime acheter des légumes pour quelques dollars, parce que j’aime bien regarder les marchands de légumes brûler leurs cageots dans des grandes poubelles en métal.
Après le marché, Alex se réveille et nous allons ensemble au café du coin, un refuge d’étudiants et de hipsters. Leur café mocha « Ancho Chile » est exceptionnel, il est fait avec du vrai chocolat bien épicé (je pense que ça vient du Mexique), parfaitement assaisonné, pas la peine d’ajouter du sucre. Ils passent Sufjan Stevens, la chienne du propriétaire se ballade entre les jambes des clients. Cet après-midi, j’ai prévu de faire de la bolognese à congeler pour Alex et le poulet au curry de Maman pour me rappeler la maison. La vie est douce.

pics 066

Ancho Chile Mocha